Ce jeudi 11 février 2021 à Ouagadougou, le Réseau National de Lutte anti-corruption a organisé un déjeuner de presse dans le but de rendre public les résultats de ses observations avant, pendant et après les élections couplées du 22 novembre 2020.
Le Réseau national de Lutte anti-corruption (REN-LAC) a mobilisé 26 observateurs dont 2 par région durant trois mois pour enquêter sur des cas de corruption électorale et d’achat de conscience avant et pendant la campagne électorale.
80 jours après la tenue du double scrutin présidentiel et législatif qui a porté Rock Marc Christian KABORE à la tête de la magistrature suprême, le Réseau national de Lutte anti-corruption dévoile les chiffres de la fraude et de la corruption électorale.
En effet, il ressort du rapport du REN-LAC que 439 cas de corruption ont été observés dont 314 observations directes et 125 cas de témoignages. Pour Issouf PARE, secrétaire en charge des enquêtes, les faits de corruption directement observés ont concerné essentiellement la distribution d’argent (35%), la distribution de carburant (19%), la distribution de tee-shirts avec ou sans l’effigie du parti (18%), les dons en nature (11%), utilisation des biens de l’Etat à des fins de campagne électorale (7%) et les autres actes de corruption (cadeaux aux leaders d’opinion, transfert et transport des électeurs, intimidation des électeurs) qui représentent 10%.
Le MPP (46,9%), le CDP (10,7%), l’UPC ( RPI (5,5%), AGIR ENSEMBLE (5,5%) et le NTD (3,2%) en tête des partis qui ont procédé à l’achat des consciences à travers la distribution d’argent, de carburant, de tee shirt…
Selon le secrétaire en charge des enquêtes, ce sont ces six premiers partis qui ont le plus fait preuve de mauvaises pratiques au cours de la pré-campagne et de la campagne et qui ont eu plus de voies lors du scrutin. Le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) qui est à la tête des partis politiques cités dans les cas de corruption lors des élections couplées du 22 novembre 2020, a 206 soit 49,6% cas de corruptions électorales observés et s’illustrait par la distribution d’argent, la distribution de carburant, la distribution de tee shirt, de don en nature et l’utilisation des biens de l’Etat dans les villes de Kaya, Tenkodogo, Koudougou…
Il faut noter aussi selon le REN-LAC, une campagne déguisée avant l’heure a été. Il s’agit notamment de la distribution des vivres et les dons entrant dans le cadre de la lutte contre la Covid19, une subvention pour l’établissement des cartes d’identité burkinabè offert par les ténors du MPP tels Lassané KABORE, Abdoulaye MOSSE, Issa SEMDE, le Laarlé Naaba, Salifou TIEMTORE etc Sans oublier le droit de vote des citoyens remis en cause dans certains endroits.
Les recommandations:
Si la bonne organisation des élections a été saluée par la plupart des partis politiques et observateurs nationaux et internationaux, n’empêche que le scrutin a été marqué par quelques difficultés. Le non affichage des listes électorales aux niveaux des centres de votes pour faciliter la recherche, la fusion des bureaux de vote sans prévenir les électeurs, l’ouverture tardive de certains bureaux de vote… Au regard de ses insuffisances constatés avant, pendant et après les élections, le REN-LAC a formulé des recommandations. Il s’agit pour les acteurs politiques « d’adopter un comportement responsable en bannissant les actes proscrits et les ruses pour contourner la loi, éduquer et sensibiliser leurs militants pour lutter contre la corruption et les mauvaise pratiques » ; pour le gouvernement « repenser le mécanisme de financement des partis et formations politiques afin de plafonner les dépenses de campagnes » ; pour la cour des comptes « veiller à l’obligation de reddition de comptes qui incombe aux partis politiques et aux candidats aux différentes élections » ; à l’endroit du parlement « proposer une loi sur le plafonnement des dépenses de campagnes » ; à l’endroit de la CENI « renforcer la sensibilisation des différents acteurs politiques sur le contenu des différentes lois et dispositions en vigueur en matière électorale ». A l’endroit du Conseil supérieur de la communication (CSC) le REN-LAC préconise la revue de l’interprétation de la notion de la campagne déguisée.
A la justice la mise en place d’un dispositif de poursuite et de réprimande de la corruption électorale avec promptitude dans toutes les juridictions et à la population le REN-LAC leur demande de « refuser et dénoncer la corruption électorale ».
Léa SAMA