Burkin Faso: Le sous-bassin du Kou noyé jusqu’au cou

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Ressources en eau

Le sous-bassin du Kou noyé jusqu’au cou

La rivière Kou, située dans la région des Hauts-bassin est en proie à de multiples phénomènes qui entrainent sa disparition. Il s’agit notamment de l’ensablement, l’envasement, de la pollution à outrance, l’occupation anarchiques et des pratiques dégradantes etc. Cette menace de disparition expose une importante partie de cette région à des crises graves socio-économiques. Ainsi, un SOS s’impose pour sauver une ressource hautement vitale pour l’économie et l’existence pour des millions de personnes.

 Le Kou est un cours d’eau situé dans la région des Hauts-Bassins. Il s’étend sur une longueur totale d’environ 80 km. Elle couvre les communes de Bobo-Dioulasso, de Bama, de Péni, de Karangasso-Sambla et de Toussiana. Ses potentialités notamment agricoles qu’elle offre, ont provoqué un déplacement massif des populations des quatre coins du Burkina pour y mener des activités génératrices de revenus. Cette massification de la population autour de cette rivière a engendré de fâcheuses conséquences. Le sous-bassin du Kou est devenu le symbole de la dégradation des ressources en eau obstruant par ricochet le développement d’une importante partie de la région et menaçant directement ou indirectement des millions de vie. 

Le Kou soumis au comblement

Le phénomène du comblement est assez prononcé dans le sous-bassin du Kou. Le comblement renvoie aux phénomènes de l’ensablement et de l’envasement. Selon le magazine GIRE Info n°003 de janvier-juin 2019, le comblement « englobe tout processus de dépôts de sédiments dans les hydrosystèmes.  Il concerne donc l’ensablement et l’envasement». En d’autres termes, le comblement désigne le remplissage d’un cours d’eau d’éléments étrangers comme le sable. Il se matérialise par l’ensablement qui désigne « tout envahissement par des grains de sable, aboutissant à l’accumulation de sable dans un hydro-système-hydrique (retenue d’eau, barrages, marres, fleuves, rivières, etc). Quant à l’envasement, il s’agit du dépôt de vase c’est-à-dire les limons, argiles, éléments fins dans un cours d’eau ou une retenue d’eau. Ces deux calamités pour les ressources en eau sont une réalité assez prononcée sur le Kou. Ces deux phénomènes bien qu’observables tout le long du cours d’eau sont particulièrement visibles au niveau des deux ponts construits sur cette ressource. Il s’agit des ponts de Nasso et de Dinderesso. Aujourd’hui, pas besoin d’être expert pour constater le niveau d’envasement et d’ensablement de ces deux ponts. A vue d’œil, l’on constate une faible quantité d’eau qui se faufile entre des monticules de sables. Nous pouvons également constater au niveau du pont de Nasso que les rives s’affaissent directement dans le lit du cours d’eau accélérant ainsi le processus d’ensablement et d’envasement. En plus, les conduites du pont sont bouchées non seulement par des montagnes de sables mais également par des grosses branches d’arbres visiblement drainées par les eaux de pluies. Quasiment la même donne se fait voir au pont de Dinderesso.

A entendre des personnes averties, les causes du comblement de la rivière Kou sont nombreuses. Cependant, le principal facteur qui a conduit à l’assèchement du Kou, à entendre Garba Florentin, directeur de la police de l’eau des Hauts-bassin, est le fait des installations anarchiques et les mauvaises pratiques agricoles. En effet, le sol remué par les paysans dans leurs champs est charrié par les eaux de ruissèlements dans le lit de la rivière. Pire, des milliers de ces personnes se sont même installé dans le lit de la ressource pour y pratiquer des cultures maraichères et de contre-saisons. Ainsi, dans leurs pratiques agricoles, la terre est toujours remuée. Ce qui entraine et accélère les phénomènes d’ensablement et envasement du Kou. Et le chef du service de la police de l’eau affirme que cette installation anarchique s’est fait tout le long du cours d’eau. Les paysans qui s’y installent prétextent du manque de terre cultivable pour occuper le lit de la ressource. En rappel, la législation instituant le service de la police de l’eau lui confère entre autres missions de veiller au respect des bandes de servitude des cours d’eau et retenues d’eau. Et les fréquentes missions de cette police permettent de plus en plus de dégager les bandes de servitude du Kou. Malheureusement, ce service public semble submergé par la démultiplication des agriculteurs qui ne cessent de s’installer autour et dans le lit du cours d’eau. Cette donne aggrave le comblement de cette rivière. Entre autres causes, il y a le phénomène du déboisement des arbres autour du Kou qui concouraient à sa protection contre les érosions et les dégradations des berges. Ce qui entraine gravement l’envasement et l’ensablement de la rivière. Il n’est pas inutile de rappeler que le trafic de bois bat son plein dans cette localité. 

En plus du phénomène du comblement qui conduit son assèchement, la rivière Kou est en proie à une pollution à outrance due à l’usage abusive et incontrôlé des pesticides. Et la plupart de ces produits ne sont même pas homologués. Le Kou est donc pris entre l’enclume du comblement entrainant sa disparition et l’étau de la pollution faisant de l’eau qui reste un danger public pour la multitude d’utilisateurs (Hommes, animaux et végétaux). Malheureusement, cette situation fait peser un grand péril à proportion apocalyptique pour les usagers. Car le besoin d’eau pour une flopée d’usage se fait de plus en plus pressant. Il s’agit notamment des besoins d’approvisionnement en eau potable de la ville de Bobo-Dioulasso, des besoins domestiques, agricoles, industriels, miniers, pêche, etc. 

De graves conséquences actuelles et futures   

En rappel, la rivière Kou traverse une vingtaine de villages et dessert la ville de Bobo-Dioulasso en eau potable. Le comblement du Kou a par conséquent de graves inconvénients sur d’importantes activités vitales de la région. Déjà, la rivière a tellement perdu de sa capacité que d’aucuns parlent avec un certain réalisme de la disparition ou de l’assèchement du sous bassin du Kou. En effet, dans les années 60, le débit de cette rivière oscillait entre 2500 -3000 litres/seconde. Ce débit est passé entre 800 et 1000 litres/secondes en 2012. De nos jours, cette capacité à vue d’œil est en chute libre. Le Kou a effectivement amorcé un début d’assèchement. Cette situation provoque une criarde insuffisance d’eau pour irriguer les 1 260 hectares du périmètre de Bama amenagé pour la culture intense du riz. Il faut aussi dire que les aménagements hydro-agricoles recensés dans ce sous-bassin couvrent une superficie d’environ 3200 hectares alimentés par la rivière Kou. En plus la majorité des industriels est installée dans ce sous bassin. Son tarissement plonge tous ces usagers dans un calvaire indicible. Il faut également ajouter que l’Office Nationale de l’Eau et de l’Assainissement (ONEA) exploite cette source d’eau pour l’approvisionnement en eau potable de la ville de Bobo-Dioulasso. Le tarissement de cette rivière fait peser aux populations de cette grande ville le risque de ne pas jouir convenablement du droit à l’eau à cause du manque criard d’eau. Malheureusement, d’un côté la ressource s’amenuise et de l’autre côté la population de la ville de Sya croit au galop. Par ailleurs, la multiplication des brèches a fait que l’eau a quitté son lit normal et naturel pour emprunter d’autres voies. Et cela provoque de fâcheuses conséquences. Par exemple, M. Florentin Garba nous apprend que depuis trois le village de Sonssogona est victime d’inondation causée par ces brèches. Il en est de Nasso depuis 2018. Et les installations de ONEA en partissent pendant les mois d’abondance pluviométrique. Ce qui endommage ces installations et obstrue la fourniture d’eau aux populations. Il faut marteler que -selon des personnes ressources excipant les conclusions du Forum régional sur le Kou organisé en 2011- cette rivière génère plus 5 milliards annuellement pour l’économie nationale. Alors ladite étude révèle qu’il faut environ 3 milliards pour sauver la ressource Kou. Si la tendance de comblement provoquant le tarissement de la rivière Kou continue, il va s’en dire qu’une catastrophe à proportion apocalyptique scintille à l’horizon.

Des actions de sauvetage

Les phénomènes conduisant au tarissement du Kou suscitent de vives préoccupations au niveau des structures publiques commises à la protection et à la sauvegarde des ressources en eau. Ainsi, le ministère de l’eau et de l’assainissement par le truchement de l’Agence de l’Eau du Mouhoun (AEM) et d’autres structure y rattachée s’active à sauver la rivière Kou. Ainsi, de plus en plus d’activités de sauvegarde se concentrent sur cette ressource. Par exemple, chaque année des opérations de curage des deux ponts sus cités sont effectuées en collaboration avec les populations riveraines. Deux activités de curage des deux ponts ont été exécutées en 2020. Et à ces occasions, les Comités Locaux de l’Eau (CLE) intervenant sur le Kou sont également fortement mobilisés pour des actions de désensablement et de désenvasement. La police de l’eau fait de fréquentes sorties pour sensibiliser les populations riveraines à adopter de bonnes pratiques concourant à la sauvegarde du Kou. Selon le directeur Garba, la police de l’eau a accompagné en 2016 des villages riverains du Kou notamment le village de Komi, de Sonsongna et de Diarradougou avec 2 000 plants pour les planter autour de la ressource. Mais par manque d’entretien, ce reboisement n’a pas pu produire les effets attendus. En plus, le Comité Local de l’Eau et l’Agence de l’Eau du Mouhoun construit de façon sporadique des balises pour protéger la ressource de l’envahissement d’éléments étrangers nuisibles. Mais, M. Garba reconnait que ce sont des actions qui se font juste par endroit avec des résultats minimes. Dans la foulée, M. Soumbougma indique qu’un site école a été mis en place pour entreprendre des actions de protection du Kou. Et ces actions ont consisté comme le traitement de ravine, le fait de casser la vitesse de l’eau. Des diguettes filtrantes ont également été construites  pour endiguer le comblement de la rivière. Etc.  Nonobstant ces actions de sauvetage, certains acteurs, pensent que des actions fortes doivent venir soutenir ces actions sus cités.

« Il faut des actions fortes et d’ensemble », appelle le directeur Garba de toutes ses forces

Pour sortir le sous bassin du Kou de sa situation de mort programmée, des personnes averties de la gestion des ressources en eau décline de fortes recommandations. Déjà, le directeur de la police de l’eau des Hauts bassins indique que le gouvernement doit prendre des mesures fortes. Il signale qu’il faut commencer par délimiter clairement la bande de servitude et la dégager de 100 mètres de part et d’autres des deux côtés de la rive. Le directeur et M. Soumbougma conviennent qu’après cette étape, il faut procéder au rétablir la rivière dans son lit normal et naturel en procédant à une vaste opération de desenvasement et de désensablement de tout toute la ressource. Et concomitamment, lancer une intense campagne de reboisement tout le long du cours d’eau aux fins de boucher toutes les brèches et le protéger du comblement. Le directeur de la police de l’eau ajoute qu’il faille procéder au déguerpissement des personnes qui se sont installées dans le lit du Kou, et au besoin faire recours à la force publique. Il est également incontournable que des ressources financières conséquentes soient mobilisées pour soutenir les actions de sauvetage de la ressource. Le directeur de la police de l’eau signale que le Forum régional du Kou 2011 avait estimé à environ 3 milliards de F CFA pour réaliser toutes les actions de restauration de la rivière. « Si on doit mobiliser 3 milliards pour sauver une ressources qui permet de générer 5 milliards chaque, je pense que cela vaut vraiment la peine », explique le directeur.  M. Garba assure que toutes les actions de sauvetage du Kou doivent être menées de façon concomitante de sorte à pouvoir engranger des résultats salutaires. Il poursuit pour dire qu’en sauvant le Kou, c’est des millions d’emplois qu’on garantit autour de cette ressource. Il illustre cette assertion par la présence du périmètre rizicole de Bama et des centaines de milliers de pays de par leurs diverses activités dépendent directement et indirectement du Kou. En rappel, la rivière Kou offre des opportunités pour la pêche, l’agriculture, la maraichère, l’élevage, etc. Mieux, restaurer le sous bassin du Kou, c’est également assurer un approvisionnement pérenne de l’eau potable à la ville de Bobo-dioulasso. Ainsi, le sauvetage du sous-bassin du Kou va recentrer cette importante ressource en eau dans son rôle irremplaçable pour le développement socio-économique d’une grande partie de la région des Hauts-bassin.

La Rédaction

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