Les travailleurs des médias privés du Burkina ont organisé une conférence de presse au Centre national de Presse Norbert Zongo. Objectif, revendiquer l’amélioration des conditions de travail et de vie des journalistes du privé.
Le journaliste de l’Evènement Hamidou Traoré qui a lu la déclaration liminaire a indiqué que le dernier classement de Reporter Sans Frontière, publié au mois d’avril passé, plaçait le Burkina Faso, 1er pays francophone en Afrique, et 37e à l’échelle mondiale sur 180 pays en matière de liberté de presse. Ce résultat fort appréciable à l’actif des journalistes du pays démontrent qu’ils font leur travail dans le professionnalisme. Mais pour Hamidou Traoré, lorsqu’on jette un regard sur les conditions de vie et de travail des journalistes du pays, surtout ceux du privé, « l’on constate que ces derniers exercent dans des conditions exécrables pour ne pas dire esclavagistes ». Pour lui, le 11 juin 2020, lors de leur conférence de presse, ils évoquaient la situation des journalistes du privé qui souffrent terriblement le martyr à cause de certains faits que sont, entre autres, la non application de la Convention collective, l’absence de contrat de travail, l’absence de plan de carrière, l’absence de déclaration à la Caisse de sécurité sociale, ou des déclarations non suivi de cotisation, absence de couverture sanitaire, etc.
« Nous avons souhaité que tous ces points soient solutionnés notamment par l’application pleine et entière de la Convention collective que les patrons de presse, les Organisations professionnelles de médias et l’administration publique ont librement signés ». Même si les lignes ont bougé un tant soit peu comme la promesse de l’ex- ministre en charge de la communication Remi Djandjinou de commanditer une étude sur les conditions de travail, résultats « que nous attendons toujours ». « Comme vous avez pu le constater, fondamentalement rien n’a changé »,a-t-il indiqué. Il a affirmé que sur un effectif de 421 organes, ils ne valent pas dix organes qui appliquent la Convention collective. « La précarité des conditions de vie et de travail des journalistes est malheureusement la norme à plusieurs niveaux ». Et de regretter que les travailleurs des médias privés continuent de s’enliser dans la précarité. Pour lui, la majorité écrasante des journalistes exerce la profession sans contrat de travail formellement établi. « Des patrons plus entreprenants dans l’esclavagisation des journalistes du privé ont eu l’ingénieuse idée d’établir non pas des contrats de travail mais des contrats de prestation, rendant drastiques les conditions de rémunération de leurs journalistes. Certains de ces contrats sont valables pour six mois et renouvelables n fois en fonction de la capacité du journaliste à endurer leur diktat »,a-t-il dénoncé.
A titre illustratif, chez certains patrons, il a fait savoir qu’un article validé et publié est payé à 2500 FCFA et soumis à une taxation de 25% donc 625 francs. « Et le journaliste est rétribué à 1875. Si l’article est rédigé par deux journalistes, ils partagent les 1875 à deux. Mais, ces derniers font le travail de terrain avec leurs propres engins, leur carburant, leurs téléphones et leurs unités et mégas, etc. Certains journalistes mieux placés que ces derniers sont rémunérés par des salaires de misère très loin du SMIG et de façon discontinue. Il n’est pas rare de voir des journalistes percevoir 25 000 F non pas par mois mais en fonction des humeurs du responsable de l’organe », a-t-il fait savoir. Aussi, en plus, la situation de la plupart des journalistes du privé reste caractérisée par une absence de sécurité sociale, même s’ils sont inscrits à la Caisse nationale de Sécurité sociale, Hamidou Traoré a confié que les cotisations ne sont pas versées. C’est pourquoi les animateurs de la conférence de presse ont interpellé tous ceux dans l’administration publique qui prêtent main forte à ces fraudeurs à cesser car cela nuit aux journalistes du privé.
« Nous voulons particulièrement interpeller la CNSS d’arrêter de délivrer des documents prouvant que certains patrons sont à jour des cotisations de leurs journalistes alors qu’ils sont très loin du compte »,a fait savoir Hamidou Traoré. Il n’a pas manqué de tirer à boulets rouge sur les premiers responsables des médias confessionnels qui exploitent leurs journalistes. « Il en est également de nos confrères des médias municipaux qui sont à la merci de maires sans scrupules »,a-t-il dénoncé. Ainsi que les conférenciers d’un jour ont interpellé l’Etat à se porter garant de l’amélioration des conditions de vie et de travail des journalistes. « Les subventions de l’Etat octroyées aux médias privés ne vont pas toujours là où elles doivent aller. Les journalistes sous- payés ou pas payés du tout tuent leurs propres engins pour leurs organes »,a-t-il soutenu. Il a précisé que « notre revendication n’est pas que pour une quête d’aisance financière. Elle a pour fondement notre ferme volonté d’œuvrer à l’avènement d’un véritable Etat de droit, une démocratie effective dans ses composantes économiques et de justice sociale au Burkina Faso. Et cela passe nécessairement par l’instauration de conditions de vie et de travail acceptables pour les journalistes »,a-t-il laissé entendre.
Hamidou Traoré a interpellé le ministère de la Communication à prendre des mesures visant l’application pleine et entière de la Convention collective de 2009 par les patrons dans sa lettre et dans son esprit, tout en espérant son amélioration au fur et à mesure. Au Conseil supérieur de la communication, il l’a ’interpellé à ne pas seulement se comporter comme un gardien du régime en place, mais de regarder aussi les conditions de vie et de travail des animateurs des organes de presse, gage d’un journalisme utile et porteur d’informations d’intérêt public. Aux patrons de presse, « nous vous invitons au respect des engagements que vous avez librement pris en signant la Convention collective depuis 2009. Ainsi, nous exigeons,la pleine application de cette Convention avec des contrats de travail en bonne et due forme, un plan de carrière, une couverture sanitaire appropriée, le versement des arriérés de salaire, la déclaration des travailleurs suivie de cotisation effective à la CNSS »,a exigé Hamidou Traoré.
Par Rayanne Ouédraogo